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| | [Recueil] Journal Très Intime | |
| | Auteur | Message |
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Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: [Recueil] Journal Très Intime Lun 29 Mai - 23:20 | |
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JOURNAL TRÈS INTIME ~ Préface ~
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Cher journal,
J'ai tant de choses à te dire, tant de songes à te confier. Je ne sais par où, par lesquels commencer, mais je suis certaine d'une chose : tu seras à la fois mon confident et mon correspondant le plus secret. Ces mots couchés sur ces pages, tu les liras attentivement. Et bien à ta façon, ou plutôt, de mille et une façons, tu y répondras, sous autant de noms différents. Es-tu prêt à m'entendre ? Prépare-toi à frémir sous ma plume. Je vais faire couler l'encre ; la noire, la rouge, humides sur ta blanche peau nue.
Un homme sait-il tout ce qu'une femme donne pour lui ? Une femme sait-elle tout ce qu'un homme désire pour elle ? Jamais l'un et l'autre ne se comprennent vraiment. Une courtisane, seule le sait, dansant sur la tranche sans jamais retourner le revers de la médaille.
Et toi, tu es et seras mon journal très intime.
Aria Nova di Carmine de Rivère[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Note de l'auteur : Ce recueil de textes à caractère érotique s'adresse à un public averti, car l'importante charge d'images sensuelles que les mots y esquissent, si belles soient-elles, ainsi que les illustrations artistiques qui accompagnent les textes, sont susceptibles de heurter certaines sensibilités. - Citation :
Sommaire
Dernière édition par Penthesilia le Mar 30 Mai - 2:03, édité 3 fois |
| | | Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: Re: [Recueil] Journal Très Intime Mar 30 Mai - 0:20 | |
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Elle s'éveilla soudain, en pleine nuit ; il s'agissait bien de son lit, de sa chambre, et elle portait bien la même nuisette de satin sombre qu'elle avait enfilée avant de se laisser gagner par le sommeil. Seulement, elle n'était plus seule : quelqu'un se tenait là, debout au pied de sa couche. Un homme dont elle ne dicernait pas le visage dans la pénombre : un pantalon brun usé par le temps et le labeur et une chemise simple en tissu fin, qui semblait lui coller à la peau, si bien que les filaments de lune qui s'infiltraient à travers les interstices des volets refermés dessinaient le relief de la musculature masculine sous le vêtement. Les manches courtes dévoilaient, de l'individu, les bras puissants, tandis que le haut de la chemise, légèrement ouvert, laissait deviner une fine pilosité sur le torse viril.
Elle aurait dû avoir peur, et en vérité, elle était un peu effrayée, mais tout à la fois fascinée, pour une raison qu'elle ne pouvait expliquer, presque comme hypnotisée par la présence de l'homme. Un silence pesant s'installa dans la chambre, entre eux, tandis qu'elle le fixait, le déshabillait du regard, figure ou corps sans visage dans l'ombre ; et il la dévisageait en retour. Que pouvait-il bien faire là ? Elle aurait voulu le lui demander mais les mots semblaient piégés au fond de sa gorge. Elle sentait ses yeux, sévères sur elle, comme une prise cruelle et sans faille, et elle s'en trouvait sans voix, impuissante. Et bientôt, elle se trouva nue face à lui, ses jambes exposant odieusement sa féminité moite à l'inconnu. Pourquoi s'était-elle subitement dévêtie ? Pour lui ? Elle ne pouvait non plus l'expliquer...ou peut-être le pouvait-elle : elle sentait, en elle, grandir un désir irrepressible. Il était né au moment même où elle avait ouvert les yeux sur cet homme, et la voilà désormais ruisselante d'émoi. C'était intolérable d'indécence, pour elle, pour sa famille. Et pourtant, c'était bel et bien en train d'arriver.
Sans même le réaliser, elle rampait déjà vers le rebord du lit pour rejoindre l'étranger. Et lui était-il bien étranger ? N'était-ce pas cet homme que, si souvent, elle avait déjà croisé ? Cet homme dont l'allure était force, dont la voix faisait autorité, régnant en maître sur ses envies ; le fantasme chevauchant la raison, bête sur une bête dans l'obscure clarté en son propre sein. La lumière argentée, presque blafarde et aveugle de la lune continuait de filtrer, insidieuse, au travers des rideaux de velours, faisait danser les ombres comme autant de mines de fusin, dessinant les contours d'une forme qu'elle devinait, imaginait prisonnière, comprimée sous le tissu entre les jambes de l'hommes. Ses lèvres tremblantes se refermèrent dessus, aussi fiévreuses qu'audacieuses, jouant de sa langue pour deviner, peut-être, toute l'immensité qu'elle pouvait atteindre. Chacun de ses sens était en éveil : elle pouvait entendre leurs respirations s'entremêler à mesure qu'elle prolongeait, intensifiait l'humide étreinte, elle pouvait, tandis que ses mains agrippaient le rebord du vêtement et le tiraient doucement vers le bas, sentir les effluves, les arômes prégnants de virilité, l'odeur de la transpiration masculine, déborder de la peau de son compagnon ; l'ennivrant jusqu'à suffocation, ou bien était-ce son esprit qui se noyait dans un monde de plaisir, où sens du mot dépravation se redéfinissait, se réinventait et se redécouvrait comme une heureuse et abjecte épiphanie.
Forte d'une insolence nouvelle, elle se sentait prête à se réaliser pleinement comme une créature de pure luxure, objet des désirs de l'homme, qu'elle lisait de mille façons, au-delà de tous les mots qu'une plume pouvait coucher sur une page de carnet. C'est à ce moment précis que l'instant même lui échappa. De la pureté inenarrable du désir et du plaisir, il ne restait que son souffle, les palpitations de son coeur. Il ne restait que son lit, que sa chambre, sombre, toujours, et la caresse des draps trempés contre sa peau encore chaude, frémissante ; il ne restait que ce récit imparfait à offrir. Et le souvenir d'un rêve, jusqu'à leur prochaine rencontre.
Aria Nova di Carmine de Rivère
Dernière édition par Penthesilia le Mar 30 Mai - 1:37, édité 1 fois |
| | | Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: Re: [Recueil] Journal Très Intime Mar 30 Mai - 0:23 | |
| - Citation :
JEUX D'AMOUR
- Spoiler:
- Citation :
Tu me cherches, je t'attends Sous des rideaux de mystères Mes secrets se cachent Tu voudrais les percer Mais ton cœur se dévoile D'une flèche mortelle C'est lui que je vise
Au cœur de la nuit noire Des lueurs tamisées Nos regards s'égarent Autant que tes songes Mon ombre elle-même danse Se cambre et s'ébranle Dans ton imaginaire
- Citation :
Tu prétends que l'amour est un jeu Dont tu connais les règles Que nous pourrions y jouer Mais tu crains pourtant d'y perdre Ton coeur s'emballe malgré toi À chacun de mes pas À chaque fois que tu me vois Jusqu'au dernier moment Tu n'auras aucune certitude Doux gambit
Nous sommes liés par le secret Tu ne sais t'en défaire Ose me faire confiance Je viserai à côté J'occupe tes pensées Tes pensées m'obsèdent Voyons-nous en rêve
Accroche-moi à tes mots Enchaîne-moi pour me retenir Salis-toi les mains Je montrerai patte blanche Dans un château de cartes Masque de porcelaine Viens m'achever - Citation :
Tu prétends que l'amour est ton jeu Tu en maîtrises les règles Tu les apprends par cœur Je suis meilleure à ce jeu-là Ton cœur gronde malgré toi À chacun de mes pas Lorsque je viens vers toi Jusqu'au dernier moment Je suspendrai tes doutes Fatale loterie
Je vais compter jusqu'à trois
- IV - Troublante fascination Ou illusion d'optique L'esprit s'embrume Énigmatique
- V - Entre mes mains Tu tombes sous les charmes Des sorts que je te lance Comme de vagues souvenirs Tu es déjà mien
- VI - Un, deux Où est passé trois ? Roi de piques Flèche en plein cœur Reine empalée Un feu coule en moi
- VII - Coup risqué Je suis le papillon Et toi la flamme Dame contre dame Tu me brûles les ailes Écailles asphyxiantes Échec et mat - Citation :
Tu prétends que l'amour est un jeu Dont tu as les atouts Ton sourire est confiant Penses-tu bien que je triche Ton cœur s'essouffle malgré tout A chaque coup de hanches Quelles cartes dans ma manche Jusqu'à l'ultime seconde Je coucherai tes craintes Sur ma cible de tir
Tu ne connais pas ma main Tu ne l'auras pas Tu as perdu la main À cette partie que tu ne peux contrôler Carré d'as
Aria Nova di Carmine de Rivère
Dernière édition par Penthesilia le Mar 30 Mai - 2:01, édité 2 fois |
| | | Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: Re: [Recueil] Journal Très Intime Mar 30 Mai - 0:24 | |
| - Citation :
MIROIRS
- Spoiler:
- Citation :
Mon reflet blafard se floue avec chaque onde qui se propage à la surface de l'eau, tandis qu'il m'embrasse dans le cou ; mes lèvres carmines entrouvertes laissent mes soupires de plaisir s'échapper, trahissant le désir qui grandit en moi. Le menton calé sur son épaule rassurante, je me vois comme on se voit dans un rêve, sans visage et sans traits, nos corps enlacés, pâles dans l'eau chaude du bain, dont les vapeurs effacent même les courbes de mon buste émergé, comprimé contre son torse viril. Son dos est constellé de mille et une gouttelettes et il me semble nous voir dans chacune d'elles, comme une voûte céleste à laquelle sont suspendues des visions de nous, un ciel entier de vespéraux rêves. Ses mains glissent sur ma peau en une aqueuse caresse qui trouble de nouveau le reflet projeté à la surface de l'eau par la lumière des bougies, lançant mes courbes dans une danse folle que chacun de mes membres, tout mon corps, cherche à reproduire tandis que je fixe cet étrange spectacle informe.
Tout s'échappe lorsqu'il me soulève pour fuir les eaux, confidentes de nos secrets humides qui bientôt, je le sais, seront dévoilés à nos peaux alanguies, l'une contre l'autre. Où m'emmène-t-il ? Tout se mélange. Le décors défile mais je n'y reconnais plus rien. Mon visage, de nouveau. Non, juste une image, transparente à la surface de la fenêtre. C'est presque comme si je venais à ma propre rencontre, et au dehors, les passants vont et viennent en filigrane, vaquant à leurs occupations, leurs préoccupations : leur monde m'apparaît si insignifiant en cet instant, mais eux, que penseraient-ils de moi s'ils me voyaient ainsi ? J'y songe en arrière-pensées tandis que mon reflet, transi de plaisir, se projette sur leurs corps physiques et tout à la fois surréels à travers le double écran et la distance qui nous séparent. Ai-je envie qu'ils me voient, autant que s'éveille en moi l'envie de me voir face à ma propre image ? Fascinante. Je suis fascinée et fascinante ; sublimée et sublime.
Ma joue et mes paumes tièdes se pressent contre la glaciale vitre tandis qu'il m'y contraint d'une main autoritaire, poussant et maintenant fermement ma tête en place, ses doigts ardents glissant à travers mes cheveux encore alourdis par l'eau. Éphémère est la douceur d'une caresse que l'autre main prodigue à la cambrure de mon dos, avant de m'empoigner fermement une hanche, trompeuse alors qu'elle me laisse à rêver de ses coups de reins, ceux que je connais déjà si bien et dont l'approche me réjouis. Il ne m'en donne pourtant rien et sa main m'abandonne, créant un vide impossible à combler. Un furieux désespoir me gagne, hâtant mes courbes ruisselantes en direction de son bassin, sans pouvoir l'atteindre. Ce n'est pas que de l'eau qui coule sur ma peau, s'écoule de mes propres chairs. Je désespère encore lorsque soudain, une gifle s'abat sur ma joue, mais pas celle de mon visage. Un cri sort de ma bouche, il m'en arrache un deuxième d'une nouvelle gifle sur l'autre joue. Mon corps tressaille et le verre me répond en m'embrassant au coin de lèvres de ses frêles vibrations, écho de mon chant de plaisir bientôt incessant. Je vois son reflet comme un mirage, décapité par le carreau de vitre. Son bras se lève, inlassable, pour s'abattre en une douce et délicieuse torture sur ma peau de velours et je crie même avant qu'il ne me touche. Il me trompe encore : je crie une fois de plus, mais le coup ne vient pas.
Ses mains agrippent enfin mes hanches, sans concession. Le prochain claquement naît de la chair frappant contre la chair, moite et sonore, à la mesure de la force qu'il imprime dans cette brutale percée, plongeant en moi jusqu'à la garde. Ma voix crie toujours pendant que mon âme hurle et que mes mains, mes ongles font crisser le verre en se crispant pour en griffer la surface ; dissonante mélodie. Ses doigts s'enfoncent dans ma peau tandis que sa virilité s'enfonce dans l'écrin de mes chairs, dont les sons me parviennent et bercent mon imaginaire. Face à moi, la reproduction qui s'anime sur la fenêtre, ou peut-être au-delà, je ne sais plus bien, me donne plus qu'à imaginer, mais il s'embue et s'efface un peu plus à chacun des souffles brûlants qui se déversent de mes lèvres déformées, expulsés de mes poumons affaiblis par chaque tressaillement dont mon corps est la coupable victime, chaque fois que son corps heurte le mien. Mon esprit fuit vers un jardin secret où chaque ombre est un rideau que le plaisir dévoile, révélant des flaques de dépravation, comme autant de puits d'une lumière révélatrice. Notre passion est un chef-d'œuvre de clair-obscur.
Nous sommes des souverains au sommet du monde. Qu'imaginent-ils, qu'imagineraient-ils, eux si minuscules en contrebas ? Peuvent-ils seulement nous voir faire ? Quelle image me renverraient-ils de moi ? Ombre des yeux, ivresse du pouvoir, liesse du spectacle ; j'exulte. Mes seins rebondissent lourdement, ajoutant à la redoutable pesanteur oscillatoire de mon corps transi, qui, à son tour, crée une troublante illusion, où tout ce qu'il m'est donné de voir tourbillonne. N'est-ce qu'une impression ? Ses mains, larges et puissantes, s'emparent de part et d'autre de ma tête pour la faire pivoter sans compromis de l'autre côté, signant la vitre d'une traînée d'aquarelle rouge qui peindra bientôt la joue qui s'y presse à la place de l'ancienne. Mes lèvres délavées délivrent un hoquet de pure surprise en découvrant la clarté du reflet de nos corps unis dans le miroir. Je le vois, beau à la perfection, la transpiration luisante soulignant le contour des muscles de son corps en action. Comme un pantin aux mouvements saccadés, inhumains, mus par une force aussi mystérieuse qu'inouïe pour lui donner un simulacre de vie abjecte, je le vois saillir d'assauts impitoyables ma croupe difforme dans la glace, scène improvisée de notre divine comédie délicieuse ; hypnotique.
Une douceur chaleur m'envahit, pas celle à laquelle je m'attends. Elle me pousse à tourner la tête vers lui. Il me sourit. J'ignore si les yeux sont bien le miroir de l'âme mais les siens savent parfaitement refléter la mienne : je l'aime.
Aria Nova di Carmine de Rivère
Dernière édition par Penthesilia le Mar 30 Mai - 9:10, édité 1 fois |
| | | Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: Re: [Recueil] Journal Très Intime Mar 30 Mai - 1:38 | |
| - Citation :
À HUIS CLOS
- Citation :
Note de l'auteur : Ce texte peut être difficile à lire et comprendre en raison de son écriture duelle et de prosodie, chargée d'ambiguïtés et de subtilités. Pareil au désir, le moindre de ses détails compte et peut prendre tout son sens pour qui sait le déchiffrer ; tout comme le plaisir, à force de pratique - à le lire, encore et encore.
- Spoiler:
- Citation :
La porte se referme sur eux. Elle l'entend gémir, elle l'entend crier. Est-ce de la douleur, est-ce du plaisir ? Elle les imagine, l'un et l'autre, l'un comme l'autre. Tout se mélange, ces sens comme ces mots qui ont plus d'un sens. Son propre supplice, en soupirs muets, ajoute à cette dissonnante mélodie, au rythme incertain. Gloire à ceux qui savent, sur cette musique, danser ; ses doigts dansent, nimbés d'une brillance solitaire sous la robe éventrée. L'autre crie. C'est à son tour de gémir.
Entre onirisme et folie, à l'apogée de la confusion des sens et de l'esprit, elle agonise. Un nouveau cri retentit, faisant écho à son désir grandissant. Elle presse sa poitrine presque douloureusement contre le mur, qui tremble bien autant qu'elle, et elle n'y trouve pas le moindre réconfort. Ses ongles raclent légèrement contre la cruelle et froide surface de bois, qui vibre de la saillie des amants. Animaux. Elle les voit en imagination, lui sur elle. Elle, laquelle ? Elle sent chacun de ses assauts, elle entend l'impact de la chair contre la chair humide. Quels mots lui murmure-t-elle ? Elle n'y entend plus rien. L'autre empoigne les draps tandis qu'elle griffe le mur. Que se passe-t-il derrière cette porte close ?
Est-ce encore son imagination qui lui joue un tour ? Il la plaque contre le mur. Son corps tressaille et se soulève, violamment empalé. Elle retient un cri, un autre encore s'échappe. Des coups raisonnent contre le mur. Des mains qui martèlent. Le bois vibre contre son corps, contre sa joue meurtrie. De quel côté du mur ? Un claquement retentit. C'est sa croupe qu'on malmène d'une main large et ferme, sans concession, lorsque ce n'est pas la peau de l'homme qui vient frotter contre la sienne, moite de cette chaleur qui l'envahit toute entière. Elle doit déraisonner. Que se passe-t-il dans ce couloir ?
Le temps se fige, ou plutôt, semble l'emprisonner dans l'instant qui se répète, encore et encore, sans qu'elle ne puisse y échapper. Ses pensées l'obsèdent, sa chair lui fait mal, son coeur se serre tandis que le plaisir la pousse vers une lente agonie dont elle ne peut connaître ni l'extase, ni la délivrance. Sa vue se trouble tandis qu'elle fixe le mur, toujours ce même mur ; si près et si loin tout à la fois. Ce n'est pas uniquement qu'elle faiblit : les larmes lui montent aux yeux, se mélangeant à sa transpiration en coulant le long de son visage grimaçant, emportant avec elles le maquillage d'ébène et de porcelaine, des mèches humides de ses cheveux se collant avec insolence contre son front, barrant sa face, frictionnant son grain de peau comme autant de fils de fer lorsque sa joue glisse contre le bois.
Et puis, tout s'arrête. Elle n'entend plus que des soupirs, les siens, les leurs. Ses jambes fébriles ploient sous son propre poids. Elle se retourne, s'adossant au mur, gisant presque au sol. Seule. Ils sont seuls. Comme le plaisir solitaire et égoïste.
Aria Nova di Carmine de Rivère |
| | | Penthesilia Randonneu(r/se) de la Côte des épées
| Sujet: Re: [Recueil] Journal Très Intime Mar 30 Mai - 1:50 | |
| - Citation :
ENTRE LES PAGES
- Spoiler:
- Citation :
Un jour comme un autre, une autre recherche à la bibliothèque. Un presque-silence règne dans ce lieu où le savoir, lorsqu'il n'est pas sur les pages, n'est que sur les lèvres, au travers de murmures. Il est assis à une table un peu plus loin, un livre ouvert devant lui, ses yeux froidement fixés sur les pages qu'il tourne, à une cadence régulière. Elle s'en rend compte lorsqu'elle se surprend à mesurer le temps ; elle ne sait pas exactement depuis combien de temps elle l'observe ainsi. Son regard se reporte sur sa propre lecture, mais elle ne reconnaît plus la page qu'elle était en train de lire, à force de tourner celles de son livre machinalement, sans y prêter la moindre attention.
Pure fantaisie, songe-t-elle, en essayant de retrouver le passage auquel elle s'était arrêtée. Les mots défilent devant ses yeux comme autant d'images sans rapport à ses pensées. Elle fait trop de bruit, c'est pour cela qu'elle sent des yeux se posent sur elle. L'observe-t-il ? C'est sans importance. Où se trouve donc ce maudit passage ? Elle ne reconnaît plus rien, il lui semble presque ne jamais avoir lu ce livre qu'elle feuillette frénétiquement tandis qu'il la déshabille du regard. Non, cela ne se peut. Est-ce un fantasme, pur fruit de son imagination ? Est-ce un désir ? L'égo se flatte si facilement d'un regard plaisant. Elle se résoud enfin à relever le visage, mais il ne se trouve plus à sa place.
Frénétiquement, son regard darde d'une table à l'autre, d'un rayonnage à l'autre. Elle l'aperçoit plus loin encore, en train de chercher un livre sur une étagère. Elle s'approche, faisant mine de chercher un volume à son tour, juste à côté de lui. Il ne la remarque même pas lorsqu'elle essaie de croiser son regard. Rapidement, ses yeux courent le long de son corps qu'elle devine puissamment bâti sous la tunique de soie ; il est impressionnant. Elle l'imagine torse nu, aussi magnifiquement sculpté qu'une statue guerrière. Il s'éloigne et passe dans un autre rayon. Elle ne sait même plus ce qu'elle est venue chercher dans ces étagères, elle lit à peine les titres sur les reliures qu'elle parcourt alors qu'elle se déplace lattéralement jusqu'à se retrouver dos à lui. Plus que sa présence, magnétique, imposante, elle peut même sentir une douce chaleur irradier de lui. Elle se sent subjuguée. Son sang, pourtant, bouillonne et se glace tout à la fois lorsqu'elle devine derrière elle un mouvement de sa part : s'est-il simplement baissé, s'est-il retourné ?
Les battements de son coeur s'accélèrent et s'emballent, martelant contre sa poitrine tandis qu'elle se fige. Elle imagine son torse saillant se presser contre son dos nu. Elle imagine la forme imprérieuse et conquérante qui s'érige entre ses jambes, même confinée sous le pantalon, presser contre sa croupe, jusqu'à se loger dans la crevasse offerte par ses courbes féminines, à l'exquise volupté, soulignées par la robe qu'elle porte serrée au corps. Sa rêverie prend brutalement fin lorsque, de nouveau, il s'éloigne, la laissant là, tremblante.
Dans la bibliothèque. Dans ce haut lieu de savoir, de mystères et de secrets ; de non-dits.
Un souffle de surprise lui échappe lorsque dans l'instant suivant - et combien de temps s'est-il écoulé, exactement ? - ses yeux rencontrent les siens de l'autre côté du rayonnage, pendant qu'il se saisit du livre qui se trouve juste entre leurs deux visages. Le sien est beau, anguleux, même si son regard, sombre et intense, semble capable de la transpercer de part en part. Ses yeux sont comme deux puits sans fin dans lesquels elle pourrait tomber. Elle suffoque presque, ou plutôt, elle s'interdit de respirer, dans une vaine tentative de se soustraire au passage du temps. Une seconde semble se suspendre pour une éternité tandis que la distance entre eux, l'espace tout autour d'eux, semble irrémédiablement s'étioler, sans pour autant qu'il ne fasse le moindre mouvement vers elle, ni elle vers lui. Dans ce secret qui n'appartient qu'à eux, pour un instant, ils sont seuls, elle et lui, hors du monde. Et le voilà reparti pour regagner sa place, et à son tour de retrouver la sienne. Elle feuillette son livre ; [il effeuille ses vêtements]. Il tourne une page ; [elle sent sa main agripper son sein]. À l'alentour, le bruit des pages parcheminées qu'on déplace sonne à ses oreilles comme du tissu qu'on déchire ; [la main, large et rugueuse, se rafermit, comprimant et déformant l'orbe de chair immaculé, au teint de porcelaine, dont la turgescence finit par se révéler à travers le tissu fin de sa robe]. Le remarque-t-on ? Le remarque-t-il ? Leurs yeux se croisent de nouveau, intimes mais fuyants. Leur sujet d'étude a tout à fait changer.
Elle tourne elle-même une autre page, [faisait tomber la tunique de soie qui, déjà, laissait transparaître les lignes et les contours des muscles presque constamment bandés de l'homme]. Les pectoraux prohéminents lancent à leur tour un appel aux lèvres et à la langue de l'amante ingénue. Ses jambes se croisent plus fort encore sous la table ; que penseraient les gens s'ils la savaient ainsi ruisselante ? Les siennes s'écartent ; ou est-ce encore une chimère son imagination ?
Il referme son livre dans un bruit sourd, [la seconde main masculine empoigne sa gorge]. Ses mains agrippent légèrement le tissu de sa robe, se serrant et se desserrant nerveusement. Sur la page ouverte devant elle, elle ne reconnaît qu'un seul des mots qu'elle tente de lire : "baiser" n'a jamais eu autant de significations possibles, toutes plus obscènes les unes que les autres, dans son esprit. Son parfum obsédant, relevé des notes salées de sa transpiration, lui parvient et la transporte : [les voilà dans un recoin isolé de la bibliothèque. Que se passerait-il si les gens les surprenaient ? Elle penche la tête en arrière contre le mur, ses bras graciles enlaçant son amant, l'invitant contre elle tandis qu'il dépose de fougeux baisers au creux de son cou, puis sur ses lèvres fiévreuses dont le rouge se délave. Elle penche de nouveau la tête en arrière tandis qu'il entre en elle, sans aucune douceur, scellant d'abord ses lèvres des siennes pour taire ses soupires, puis d'une de ses mains pour étouffer ses cris, qui se meurent en gémissements au fond de sa gorge, comme autant de suppliques désespérées : lui demande-t-elle d'arrêter ou de poursuivre ? La voilà plongée dans son propre roman].
Et lui dans le sien, lorsqu'il la fixe avec intensité. Ce regard, qui a déjà transpercé son coeur, peut-il aussi transpercer son âme ? [Tout comme elle l'imagine lui transpercer les chairs avec vigueur]. La met-il à nu sous les vêtements comme il met à nu chacune de ses odieuses pensées ? Ses yeux se noient dans les siens avant de glisser sous la table à laquelle il est installé, plus longtemps qu'elle ne le voudrait, suffisamment pour désormais y discerner une forme monstrueuse serpentant jusqu'à sa cuisse. Il lui faut replonger dans sa lecture... Dans son propre roman. Son esprit hésite et se trouble. [La main de l'homme glisse le long de sa cuisse, remontant sous la robe jusqu'à sa croupe. Il lui relève alors la jambe en même temps qu'il la plaque contre le mur pour la prendre avec une violente passion. De ses bras puissants, il la soulève ; les jambes de l'amante l'enlacent tandis qu'il poursuit son oeuvre, inépuisable, labourant son antre avec une ardeur renouvellée. Intarissable, comme le plaisir masculin qu'elle imagine, tiède, se déverser en elle. Intarissable comme son imagination. Intarissable comme la propre source de son désir, que l'envahisseur chasse au dehors à chaque assaut qu'il répète, s'appropriant la moindre parcelle d'espace en elle.
Mais les meilleures choses ont toujours une fin. Depuis quand n'est-il plus là ? Ses yeux le cherchent partout, mais c'est à ses côtés qu'il ressurgit. Leurs regards se croisent encore, partageant une histoire qu'ils ont écrite un peu ensemble, un peu l'un et l'autre ; qu'ils se sont racontée peut-être sans vraiment le savoir, sans être sûrs de rien. La seule chose dont elle est certaine, c'est qu'il lui sourit, avant de disparaître. Le reverra-t-elle jamais, cet homme ? Le courage lui a manqué pour lui demander son nom. Elle doit croire que son sourire était une promesse : elle ne saurait laisser ce roman inachevé.
Le lendemain, elle reviendrait, mais plus jamais elle ne verrait la biblothèque de la même façon.
Aria Nova di Carmine de Rivère |
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